QUESTIONS EXISTENTIELLES

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Choix ou karma ?

591 Unité dans la dualité
591 Unité dans la dualité

L’esprit, les agrégats* mentaux (sensation, perception, formations mentales, conscience) sont un enchaînement de moments mentaux (mind moments) qui se conditionnent les uns les autres, une suite de causes et de conditions, où le choix a peu de place. Le choix est probablement une formation mentale, une pensée, conditionnée par la sensation ou la perception qui la précède. On peut considérer aussi la chaîne d’interdépendance*, qui de nouveau est une suite de causes et d’effets où l’ignorance conduit automatiquement à la souffrance, sans choix de notre part, et où l’apparition de chaque moment mental conduit à sa cessation.

On peut dire aussi que toutes nos pensées, paroles et actions créent notre karma, c’est-à-dire les causes et les conditions de nos pensées, paroles et actions futures, comme nos pensées, paroles et actions passées ont créé nos conditions présentes.

Ce qu’on peut alors se demander, c’est si le fait de faire de bonnes actions, du bon karma, plutôt que du mauvais, est un choix délibéré ou non, et si le fait de pratiquer le Dharma*, et déjà de le rencontrer, est un choix, ou est le résultat d’une suite de causes et de conditions sans commen­cement ?

De même pour les bonnes résolutions et la discipline de les mettre en œuvre. Il semble qu’à certains moments de notre vie, il y a des changements qui s’effectuent, qui se mettent en place, suite à certains événements, à certaines rencontres, ou à des révélations, insights*, compréhensions… Est-ce que ce sont des choix ?

Je ne crois pas. C’est plutôt comme si à un certain moment nous étions attirés sur une voie par des forces mystérieuses qui semblent bien au-delà de notre volonté ou de notre libre arbitre. On suit son Dharma, son destin, sa vocation, sa mission… de la même manière qu’on est conduit à suivre certaines études, à pratiquer un métier, à entreprendre des voyages, à rencontrer certaines personnes avec lesquelles on va avoir des relations privilégiées : des amis, des conjoints, des maîtres, des collaborateurs, des associés, etc. Sans qu’on puisse dire qu’à un certain moment un choix délibéré soit intervenu.

Y a-t-il plus de choix dans la rencontre d’un nouvel amant que dans un accident de la route, dans le commencement d’une nouvelle activité que dans le début d’une maladie ? En dehors du fait que le mental ou l’ego s’approprie les premiers comme des choix délibérés et considère les seconds comme de fâcheux coups de sort.


Agrégat (pali : khandha) : khandha signifie agrégat, tas, ensemble. Les cinq agrégats sont, selon les bouddhistes, les cinq grandes catégories – ou ensembles d’éléments – qui constituent l’être humain. Il s’agit de l’agrégat matériel : le corps (rupa), et des quatre agrégats mentaux : la sensation (vedana), la perception (sañña), les formations mentales (sankhara) et la conscience (viññana).

Chaîne d’interdépendance (pali : paticcasumuppada) : la loi de l’interdépendance – de l’origine conditionnée et interdépendante de tous les phénomènes – est, avec l’impersonnalité, un des fondements de la doctrine bouddhique. La loi de l’interdépendance est une des lois de la nature, à savoir que toutes choses – qu’elles fassent partie de l’environnement, de la société, de l’individu ou de l’esprit – sont interconnectées et ont entre elles des relations causales. Cette loi est généralement exprimée sous la forme d’un enchaînement de douze maillons – dont chacun est la conséquence du précédent et la cause du suivant – qui conduisent de l’ignorance à l’apparition de la souffrance. Le premier, l’ignorance, et le sixième, le contact (entre les organes et les objets des sens) sont les deux niveaux où il est possible de s’échapper du cycle de la souffrance et de l’existence conditionnée.

Dharma (sanscrit ; pali : Dhamma) : la doctrine du Bouddha, un des Trois Joyaux, avec le Bouddha et la Sangha. Dans un sens plus général, tout enseignement ou chemin spirituel. 

Insight (anglais) : littér. vision intérieure. Terme utilisé dans le bouddhisme pour désigner la méditation de la sagesse (vipassanainsight meditation), par opposition à la méditation du calme (samatha). Ce mot est couramment utilisé en anglais pour nommer une vision intérieure, révélation, compréhension, intuition profonde, prise de conscience… Comme je n’ai pas trouvé de mot français qui me semblât approprié pour exprimer la véritable connotation d’insight, j’ai préféré garder le mot anglais.

 

5 février 2015, Chiang Mai

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